Alors qu’Olympiques spéciaux célèbre son 50e anniversaire de fondation à l’échelle mondiale, un petit groupe de personnes doivent être reconnues pour leur engagement envers le mouvement à partir du premier jour.
Un compatriote à nous, le chercheur Frank Hayden, figure parmi elles. Ses travaux relatifs à l’impact du conditionnement physique et du sport sur les personnes qui vivent avec une déficience intellectuelle ont inspiré la fondation d’Olympiques spéciaux en 1968. Mais c’est par hasard qu’Hayden entreprit ces travaux qui allaient changer des vies.
Au début des années 1960, après avoir complété une maîtrise en éducation physique à l’Université de l’Illinois, Frank Hayden, de retour au Canada, était à la recherche d’un emploi.
L’Université de Toronto lui offrit un poste de chercheur à la Beverley School, qui accueillait 375 enfants des environs nés avec une déficience intellectuelle.
Comme il n’avait jamais travaillé auprès de cette population, Hayden fit quelques recherches avant d’accepter l’emploi.
« J’ai découvert qu’il n’y avait presque rien sur le sujet, se rappelle-t-il, alors je me suis dit : “Frank, tu vas devenir un expert instantané – il n’y a pas de compétition! C’est vraiment cette page blanche qui m’a attiré, mais si je suis resté, c’est à cause de l’énergie et de l’enthousiasme que m’a procurées le travail auprès de ces enfants”. »
Hayden compara les élèves de la Beverley School aux enfants sans déficience intellectuelle et découvrit que les premiers étaient « à moitié aussi en forme » que les seconds. Ses élèves présentaient une masse adipeuse 35 % supérieure et une force moitié moindre et ils se fatiguaient 40 % plus vite.
Le chercheur soumit alors ces enfants à un programme de conditionnement physique structuré, et en l’espace d’une année scolaire, l’écart fut « comblé à moitié »; il prouva ainsi que la forme physique médiocre et la mauvaise performance de ces enfants sur le plan moteur n’étaient pas dues à leur déficience, mais bien à leur « mode de vie ».
« Ils arrivaient à l’école en taxi, explique Hayden, et après l’école, ils rentraient tout simplement chez eux. Personne ne voulait jouer avec eux dans le voisinage. Si nous menions une vie aussi peu active que la leur, nous ne serions probablement pas différents. »
Hayden présenta ses conclusions lors d’une conférence internationale, sans soulever grand intérêt. Vers 1964, il publia un ouvrage complété par des plans de leçons à l’intention des éducateurs. Il s’en vendit 50 000 exemplaires.
Les travaux de Frank Hayden retinrent l’attention d’un communicateur canadien et défenseur de longue date des personnes vivant avec une déficience intellectuelle, Harry « Red » Foster, l’homme qui allait jouer un rôle clé dans la constitution en société d’Olympiques spéciaux au Canada.
Hayden et Foster tentèrent de tenir des jeux nationaux d’Olympiques spéciaux à Toronto, mais le projet avorta.
Ce n’est qu’en 1965, quand Hayden reçu un appel de la Fondation Kennedy, que l’idée commença à gagner du terrain. Eunice Kennedy Shriver, sœur de John Kennedy, président des États-Unis, dirigeait des camps d’été pour personnes présentant une déficience intellectuelle et s’intéressait aux travaux de Hayden.
Hayden déménagea à Washington (D.C.) avec sa femme, Marion, et quatre enfants à charge pour collaborer avec la Fondation Kennedy à l’organisation des tout premiers jeux Olympiques spéciaux au Soldier Field de Chicago.
Les jeux eurent lieu le 20 juillet 1968, rassemblant des athlètes venus de 25 États américains de même qu’une équipe canadienne de hockey intérieur formée d’élèves de la Beverley School.
Hayden se rappelle avoir vu Foster ce jour-là. « Il était rouge comme une tomate à cause du soleil, mais l’enthousiasme se lisait sur son visage […] Il a vu ce qui se passait et il m’a dit : ‘‘Frank, c’est fantastique. On devrait avoir ça au Canada”. »
Avec l’aide de Foster, les premiers jeux Olympiques spéciaux canadiens se tinrent à Toronto l’année suivante, tandis que Hayden continuait à faire croître le mouvement aux États-Unis.
À la fin des années 1980, Frank Hayden aida à lancer 50 sections d’Olympiques spéciaux de plus autour du monde, avant de se joindre à Olympiques spéciaux Canada en 1994.
À 88 ans aujourd’hui et retraité, Frank Hayden éprouve toujours la même grande passion pour le mouvement.
L’athlète albertain Darby Taylor se rappelle avoir entendu parler Frank Hayden pour la première fois aux Jeux d’été d’Olympiques spéciaux Canada 2010 à London (Ontario).
« [Olympiques spéciaux] est très important pour moi, affirme le joueur de soccer de 24 ans. Ça m’a fait sortir de la maison, rencontrer des gens. Je suis un grand fan de M. Hayden. »
Taylor a présenté la candidature de Frank Hayden à l’intronisation au Panthéon des sports canadiens.
« La plupart des gens ne réalisent pas qu’il existe une filière canadienne solide de l’organisation mondiale, a écrit Taylor sur le formulaire de mise en candidature. La participation de Hayden à la création d’Olympiques spéciaux […] a fait une différence inestimable dans la vie de ceux et celles qui ont une déficience intellectuelle. Je fais partie de ces personnes et je suis très fier d’être un athlète d’Olympiques spéciaux. »
Taylor s’est envolé pour Toronto pour assister à l’intronisation de Frank Hayden en 2016. Les deux hommes sont toujours en contact.
Que ce soit pour l’athlète participant aux Jeux Olympiques spéciaux mondiaux ou pour l’enfant de cinq ans inscrit au programme Enfant actif dans un centre communautaire, « le sport est la solution », estime Frank Hayden.
« Je n’ai jamais voulu découvrir le coureur présentant une déficience intellectuelle le rapide, précise-t-il. Je voulais améliorer la forme et la santé [de ces enfants] pour qu’ils aient la chance de réaliser leur plein potentiel. »
Pour aider Olympiques spéciaux à maintenir son impact dans la vie des Canadiens nés avec une déficience intellectuelle pendant les 50 années à venir, faites un don aujourd’hui même.